Snøhetta+DIALOG : nouvelle bibliothèque centrale de Calgary au Canada

En remplacement de la structure d’origine de la bibliothèque centrale de Calgary (Canada), le célèbre cabinet norvégien Snøhetta a conçu en collaboration avec les canadiens DIALOG un nouveau bâtiment particulièrement représentatif de l’engagement de la ville en faveur de la culture et de sa diffusion comme vecteur de progrès social. Le pouvoir des livres et du savoir démontre encore toute sa force dans cette nouvelle bibliothèque publique dans la mesure où il permet non seulement de créer une communauté spirituelle libre et accueillante mais aussi de fédérer géographiquement des zones urbaines auparavant séparées par des voies infrastructurelles.
Résultat d’un concours lancé en 2014 par la Calgary Municipal Land Corporation et plus gros investissement public de Calgary depuis les Jeux olympiques de 1988, l’édifice de Snøhetta et de DIALOG inauguré le 1er novembre 2018 offre une nouvelle structure à l’un des plus grands réseaux de bibliothèques d’Amérique du Nord dans une ville où plus de la moitié des habitants empruntent régulièrement des ouvrages. Dans la lignée des bibliothèques appréhendées comme des centres à vocation civique visant à recevoir et à solliciter les stimuli de ses usagers, l’établissement de Calgary est le miroir de ses utilisateurs. Il parvient en effet à proposer des espaces très différents où chacun - du plus jeune au plus âgé, des personnes en quête de silence et d’intimité à celles recherchant des interactions - peut trouver sa propre dimension et passer du temps dans ce lieu sans se sentir étranger à l’espace ou à la communauté.
Pour atteindre cet objectif ambitieux, la première chose à faire était de positionner la structure au sein de la réalité urbaine. Nous nous trouvons au centre de Calgary, exactement là où la Light Rail Transit Line, le métro léger de la ville, divise le centre-ville, Downtown, et l’East Village. Le projet décide de résorber la fracture infrastructurelle en faisant passer la ligne de chemin de fer sous terre et en construisant la bibliothèque au-dessus. L’arc que définit le plan de la structure et qui se reflète ensuite pour former, comme le définissent les architectes, une goutte ou une ellipse en pointe, n’est rien de plus que la dérivation de la courbe souterraine tracée par l’infrastructure ferroviaire qui poursuit sa course jusqu’à la 12e avenue SE avant de refaire surface. Le projet fait ainsi disparaître le train « dans les entrailles » de la bibliothèque, comme s’il l’avalait, pour en retirer une énergie se libérant ensuite visuellement sur les surfaces, une décomposition de vitres hexagonales qui semble presque se détacher des façades, érodée par le temps et par le vent.
Bâtiment sensationnel, la bibliothèque prend la forme d’une proéminence visuelle intrinsèquement dynamique, symbole de la modernité et de l’effervescence que les gens peuvent trouver à l’intérieur.
Comprenant quatre étages (plus une mezzanine), l’édifice s’ouvre au rez-de-chaussée pour laisser passer la ligne de métro qui entre peu après sous terre. Au deuxième niveau, il forme un arc à intrados en bois (une coque à double couche revêtue de planches de cèdre rouge occidental provenant de la Colombie-Britannique voisine) qui trace une grande place au-dessous, là où se trouve l’entrée principale. Reliée à la fois à la 8e avenue à l’est et à la 31 e rue qui longe le bâtiment à l’ouest, la bibliothèque est de facto un centre-ville couvert, un carrefour piétonnier qui rétablit le dialogue entre les deux quartiers de la ville, le centre et l’est. Les pentes et les terrasses, évoquant les montagnes qui entourent la ville, hissent le bâtiment et son aspect déconstruit, un élément qui en a déjà fait une architecture de référence incontestée. De même, l’intérieur s’inspire lui aussi du paysage avec sa structure en béton apparent et ses étages recouverts de bois posés sur une série de piliers nus rappelant les « stoas », les portiques à ciel ouvert de la Grèce antique qui faisaient aussi office de lieu de rencontre et d’échange intellectuel.
Vaste et lumineux, l’atrium éclairé par la lumière naturelle provenant des fenêtres latérales et du dessus permet de saisir d’un seul coup d’œil la perspective de l’ensemble et notamment la disposition interne grâce aux deux arcs périmétraux qui orientent l’espace selon une direction donnée commune à tous les étages. Ces derniers sont dûment organisés de manière ascendante, depuis les activités publiques ou réservées aux enfants jusqu’aux espaces plus privés et d’approfondissement. Le sommet de l’édifice est constitué par une pièce ovale située juste en dessous de la lumière naturelle de la grande lucarne translucide. Appelée Great Reading Room (la grande salle de lecture), elle est réservée aux activités nécessitant silence et concentration.
Complètement transparente, telle la proue d’un navire de verre sur une mer urbaine, la pointe nord offre une perspective sur les deux quartiers de Calgary tandis que les lumières de l’intérieur confirment, la nuit, tout son pouvoir expressif.

Mara Corradi

Design Architect, Landscape Architect, Interior Architecture, FF&E, Millwork, Signage & Wayfinding: Snøhetta
Executive Architect & Executive Landscape Architect: DIALOG
Client: Calgary Municipal Land Corporation (CMLC)
Location: Calgary, Alberta (Canada)
Status: Completed 2018
Size: 240,000 sqft (2/3 larger than original library)
Structural: Entuitive
Mechanical: DIALOG
Electrical & Lighting: SMP Engineering
IT/AV: McSquared System Design Group, Inc.
Contractor: Stuart Olson

https://snohetta.com/
http://www.dialogdesign.ca/