FRES architectes réalise le théâtre de la Nouvelle Comédie de Genève

En 2009, cinq ans seulement après sa création, le cabinet français FRES de Laurent Gravier et Sara Martin Camara (prix des Femmes Architectes 2021) remporte le concours international organisé en vue de la construction du théâtre de la Nouvelle Comédie de Genève, un édifice inauguré en 2021.
Théâtre expérimental en termes de conception artistique, cet ouvrage bâti dans la perspective de devenir le cœur d’un nouveau quartier dans la banlieue de Genève - Les Eaux-Vives - s’inscrit pleinement dans le cadre des stratégies adoptées par la ville afin de se libérer des combustibles fossiles d’ici 2050.
L’histoire de la Nouvelle Comédie de Genève commence en 1987 lorsque Matthias Langhoff, scénographe franco-allemand, publie un Rapport (Édition Zoé) mettant en exergue les problèmes rencontrés par la Comédie de Genève, à l’époque située Boulevard des Philosophes, en termes d’équipements scéniques. Composée de professionnels issus du monde du spectacle, l’ANC (Association pour la nouvelle Comédie) remit ainsi à la Ville de Genève le projet d’un nouveau bâtiment ; un projet ambitieux qui appréhendait le théâtre non seulement comme un lieu de représentations mais aussi comme un centre doté de salles de répétition et d’ateliers pour les décors et les costumes. La Ville de Genève, qui avait entre-temps relancé le projet de liaison ferroviaire avec Annemasse (Haute-Savoie) en misant sur la gare d’Eaux-Vives et sur le développement du quartier, organisa en 2009 un concours international en vue de la construction du nouveau théâtre. Sur 80 projets, la Ville sélectionna la proposition de FRES Architectes baptisée « Skyline ».
D’un point de vue conceptuel, le nouvel ouvrage est imaginé comme un lieu de dialogue entre les artistes et le public. Le système « hyperfonctionnel » où tous les métiers de l’art du théâtre sont représentés et trouvent leur place prend la forme d’un bâtiment présentant une peau transparente afin d’offrir au quartier et aux passants une perspective sur les ateliers, sur le foyer et sur les espaces conviviaux. La circulation du public est organisée le long de la façade sud-est ; un hall double hauteur qui accueille une cafétéria, un restaurant, une bibliothèque et une billetterie et qui invite à participer aux activités constitutives du théâtre, les faisant ainsi sortir des salles traditionnelles pour devenir partie intégrante de la ville. Le noyau du bâtiment est composé par les salles complémentaires reliées à un seul foyer sur deux niveaux. La grande salle de 500 places est conçue dans la continuité du théâtre européen, à l’italienne, avec un rapport scène-salle frontal préétabli. L’enveloppe est constituée d’une peau pliée et facettée, tel un origami, qui accueille tous les dispositifs acoustiques et lumineux. La salle de plus petite taille (250 places) est dédiée à l’expérimentation. Un volume élémentaire et neutre, avec un système de gradin modulaire, permet la mise en place de multiples configurations. Les murs sont habillés de lames en béton fibré noires dont le motif est étudié pour garantir une excellente acoustique.
La circulation des artistes, des techniciens et du personnel s’effectue au sein de galeries superposées le long de la façade nord-ouest. Le déplacement des décors, via des couloirs aménagés en dessous des salles, permet de desservir efficacement toutes les zones, les scènes des deux salles sur un seul niveau et le grand atelier de fabrication à l’ouest.

En plus des deux cages de scène, les volumes émergents qui dessinent le profil distinctif de l’édifice abritent les bureaux de l’administration, les vestiaires et les ateliers mineurs. Contrairement aux théâtres traditionnels ne disposant que d’une seule salle et dont le corps principal s’élève en hauteur, la forme de ce bâtiment annonce la multiplicité des activités qui s’y déroulent et suggère un centre artistique débordant de vie.
Cet élément est renforcé par la variation de l’impact de l’édifice de jour et de nuit : tandis que la façade sobre et perméable évoque l’efficacité d’un atelier de création le jour, l’éclairage rouge transforme le théâtre en flamboyante forge créatrice la nuit.
Concernant la construction, les vibrations causées par les voies ferrées toutes proches constituaient un point critique du projet. Pour réduire leur impact, les architectes ont décidé de créer « une boîte dans la boîte », à savoir une structure massive en béton dans laquelle ils ont inséré les deux salles de théâtre soutenues par des structures indépendantes reposant à leur tour sur des ressorts. Cette solution a permis de dissocier les deux composants et d’éviter ainsi la transmission des nuisances sonores durant les spectacles. Le béton permet enfin d’obtenir une haute inertie thermique, un facteur clé en termes d’économie d’énergies.
La Nouvelle Comédie s’inscrit dans un quartier assujetti à un plan d’urbanisme privilégiant les énergies renouvelables : l’énergie solaire pour l’électricité et l’eau du lac pour l’énergie thermique (chauffage et refroidissement). Avec sa façade vitrée tournée vers la place et son entrée principale, le hall est devenu un espace bioclimatique à part entière. En hiver, les apports d’énergie solaire passive permettent de chauffer et de réduire les déperditions thermiques des bâtiments adjacents. En été en revanche, la ventilation naturelle générée par l’effet cheminée créé par les ouvertures supérieures garantit un excellent confort thermique.

Mara Corradi

Architects: FRES architectes (Laurent Gravier + Sara Martin Camara)
Location: Gare des Eaux-vives, Geneva, Switzerland
Competition: january - october 2009
Studies: june 2010 - october 2013
Calls for tenders: june 2015 - july 2016
Site: september 2016 - november 2020
Opening: august 2021
Client: City of Geneva, Directorate of Built Heritage (DPBA)
Co-financer: Canton of Geneva
Certification: high energy performance (HPE)
Thermal envelope equivalent to the requirements of the Minergie label
Photographer: © Yves Andre (photo@yves-andre.ch)

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