Arolat : complexe résidentiel à Istanbul

La veine créatrice au niveau architectural d'une ville en plein changement comme Istanbul est orientée vers un renouvellement figuratif qui ne s'éloigne jamais complètement de l'expressivité de son passé. Il s'agit d'une réalité qu'Istanbul partage avec de nombreuses villes italiennes et qu'un photographe italien, Gabriele Basilico, avait très bien raconté dans le reportage réalisé entre 2005 et 2010, exposé au Palazzo delle Stelline à Milan.
Si, d'un côté, des quartiers anonymes qui “remplissent” littéralement le paysage entre l'aéroport et la ville sont en construction, de l'autre, la clé de lecture quand on parle de qualité architecturale est encore celle historique, qui unit le présent et le passé dans un langage familier, une langue maternelle conceptuelle.

C'est cette ligne que suit l'agence EEA-Emre Arolat Architects, dont le nouveau complexe résidentiel, terminé depuis peu à Göktürk, dans la zone nord d'Istanbul, parle d'une contemporanéité fortement voulue, pour compenser un passé de retards culturels et de difficultés économiques, avec toutefois la conscience de l'importance que l'imagination turque traditionnelle a encore dans la mentalité courante : une valeur partagée également par la critique architecturale internationale, qui apprécie la capacité de s'insérer dans le contexte en respectant les signes et les symboles du lieu.

Les habitations qui ornent les rues d'Istanbul et ses rives donnant sur le Bosphore sont la référence figurative du projet résidentiel de Göktürk : des maisons en bois construites entre la fin du dix-neuvième siècle et la première moitié du vingtième, avec de grandes fenêtres, des balcons et des vérandas pour admirer le paysage.
Sur une structure en béton renforcé, le projet de Göktürk dessine des façades avec des fenêtres et des volets en bois dont le continuum rappelle justement les façades des habitations historiques sur le détroit. Dans ce contexte, le paysage à admirer est la grande cour verte, avec piscines au niveau du sol et jardins suspendus pour les habitations au premier étage, autour de laquelle se dressent les deux volumes séparés par une artère centrale réservée au passage.
Sur les façades à cinq étages, la série de volets en bois marque le troisième et le quatrième niveau, en les distinguant nettement des deux premiers, dont les arcades et les balcons présentent des surfaces recouvertes de pierre naturelle. Le vide décoré avec la pierre dialogue avec le plein des bandes de volets en bois, en dessinant des façades ordonnées mais riches en variations.
La majesté du complexe est nettement ramenée à de justes proportions par une alternance volumétrique de pleins et de vides, d'ouvertures et d'angles à demi privés, qui tissent une trame micro-urbaine intéressante. L'artifice et la nature se mêlent avec soin à l'extérieur et à l'intérieur du périmètre des appartements, en recréant les parcours et les vues d'un quartier urbain moderne.

Mara Corradi

Projet : EAA- Emre Arolat Architects
Responsable du projet : Ibrahim Celepoven
Collaborateurs : Abdurrahman Cekim, Eda Yazkurt, Nazli Tekin Sariyar, Ufuk Berberoglu, Deniz Akca, Esin Erez, Gozde Sazak, Selahattin Tuysuz et Gulseren Gerede Tecim
Commettant : Metal Yapi
Lieu : Istanbul (Turquie)
Surface utile brute : 78 470 m²
Début du projet : 2006
Fin des travaux : 2011
Entreprise de constructions : Metal Yapi
Fenêtres en bois
Structure en béton renforcé
Revêtement en pierre naturelle, en ciment et en bois
Photos : (c) Cemal Emden

www.emrearolat.com